Publié dans l’anthologie Poète toi-même, Le Castor Astral, 2000.

Je commence souvent par un alexandrin.

Allez savoir pourquoi. Peut-être, ça m’apaise.

Une récitation, un souvenir d’enfance,

Une étrange façon d’installer du silence.

Je ne sais pas.

De temps en temps, je brise le rythme.

Ça rime, ça ne rime pas. Ça m’est un peu égal.

Sa musique est parfois par trop monotonale,

     (d’ailleurs je fais beaucoup dans l’approximation).

Il y a le jeu des             blancs

   Et des alinéas

Le jeu de l’ortografe et de l’homme au faux nid

Tout cela pour les yeux de celui qui le voit

Ici très inutile : je lis à haute voix.

Tant pis.

Je m’impose souvent des formes régulières.

Sonnet, double quatrain, morale élémentaire,

Haïku, limerick, tanka, abécédaire,

Sans oublier bien sûr les règles oulipiennes,

Beaux présents, lipogrammes, ou bien substitutions,

Je transgresse, je triche, j’use du clinamen,

            Je m’autorise à les briser.

Je sais dès le départ de quoi je veux parler.

De la lumière du jour, des ombres de la nuit,

du regard de mon fils, des camions de pompiers,

Des voitures croisées sur le périphérique,

D’une ville étrangère, d’un vieux sac en plastique,

      De la peur de vieillir,

         De la peur de mourir,

Je relis, je reprends, je coupe, je supprime,

Ça n’en finit jamais, c’est pourquoi j’abandonne,

Et prends congé de moi sur trois alexandrins.

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