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L’Oulipo selon Le Tellier


Une “esthétique de l’Oulipo” ? À proprement parler, la chose semble impossible, le célèbre groupe lancé en 1960 par Queneau, Le Lionnais, Queval et les autres n’étant pas fondé sur une idée du beau, mais sur le rejet du hasard et la glorification de la contrainte. Docteur en linguistique et oulipien fervent (il a été coopté au sein du groupe voici une douzaine d’années), Hervé Le Tellier relève néanmoins le défi dans cette somme qui, plus qu’une approche proprement “scientifique” de la démarche oulipienne, se veut avant tout un “prisme de lecture, une promenade guidée” dans l’univers oulipien et un essai sur le plaisir du lecteur face au texte à contrainte. Impressionnant d’érudition, ce livre à destination des lecteurs motivés n’est pas dépourvu de l’humour qu’exigeait son merveilleux sujet.

Bernard Quiriny, le 1er juillet 2006

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Penser, classer les contraintes

Créé en 1960, à l’issue d’un colloque consacré à Raymond Queneau à Cerisy-la-Salle, l’Oulipo - mot formé par les premières syllabes d’« Ouvroir de littérature potentielle » - se réunit chaque mois et permet à ses trente-cinq membres vivants ou… morts - dans ce cas, ils sont « excusés » -, écrivains ou mathématiciens, de « penser, classer les contraintes » selon la formule de Jacques Roubaud. Docteur en linguistique, écrivain (auteur en 2005 de La Chapelle Sextine, illustré par Xavier Gorce, édité par L’Estuaire), Hervé Le Tellier, membre du groupe depuis 1992, présente avec simplicité l’Oulipo (« et ses plagiaires par anticipation, d’Aristophane à Lewis Carroll en passant par Restif de la Bretonne et Franquin », ce dernier, en liaison avec les « Schtroumpfs » de Peyo : cf. pp. 262-263). Hervé Le Tellier montre à merveille combien l’Ouvroir « s’inscrit dans une tradition fondatrice de la littérature, et s’ancre dans le monde, non sans mélancolie, optimisme et ironie. » A méditer, ces lignes de la p.49 d’un essai qui pétille d’intelligence et d’érudition : « Pour bien des écrivains, un livre qu’on achève est un livre qu’on tue, dont l’acte de décès est la condition nécessaire pour passer à autre chose. Au contraire, pour le lecteur, c’est l’instant où tout commence : le livre existe désormais sans l’écrivain, il vit sa vie sans lui. L’objet littéraire devient cette étrange toupie, comme le dit éloquemment Sartre, qui n’existe qu’en mouvement. Pour la faire surgir, il faut un acte concret qui s’appelle la lecture. »

Francis Matthys, le 8 septembre 2006.

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Le droit de s’emparer de tout

« Existe-t-il une approche oulipienne de l’esthétique ? Une esthétique oulipienne ? Quitte à décevoir, affirmons-le : sous cette formulation brutale, certainement pas. Le groupe est lié par un refus commun, celui du hasard, et non par une quelconque théorie du beau ». Qu’est-ce à dire ? Hervé Le Tellier cultiverait-il le paradoxe gratuit ? La provocation ? Pas vraiment. Il n’y a pas de « beau » oulipien, mais il y a une « création » et une « réception » oulipiennes, qui peuvent être étudiées, et c’est à cette étude que se consacre l’un des piliers actuels de l’Ouvroir de Littérature Potentielle, dans une perspective à la fois vulgarisatrice, scientifique, et tout de même un peu ludique, forcément. (…)

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